On parlait peu des feux en Australie pendant les fêtes, en raison d’autres actualités, et aussi parce que tout ce qui passe très loin de nous est toujours moins important. Et depuis quelques jours, c’est un sujet dont se sont emparés les internautes, et ça partage dans tous les sens sur les réseaux sociaux — cela n’aide pas beaucoup les locaux, mais ça fait partie du brouhaha des news. Ceci dit, au-delà des photos de pauvres Koala ou Kangourou brûlés, il y a des choses à tirer de ce flot d’informations sur cette série incroyable de feux qui terrassent le grand pays « down under » : des retex (retours d’expérience).
Un ami, réal / reporter d’images qui parcourt le monde, m’a envoyé cet article : « … your own citizens cannot sleep or breathe ».
Je laisse les anglophones lire l’article en entier… l’article est intéressant car il apporte un exemple concret de réaction d’une famille alertée de feux approchant.
En effet, nous sommes le jour de la Saint Sylvestre, dans une famille rassemblée pour le réveillon à Vincetia dans le SE de l’Australie. Les feux sont à quelques dizaines de kilomètres, ils sont en bord de mer et passeront leur réveillon à établir des plans de fuite.
Ce témoignage fait ressortir :
- des détails techniques & logisitiques vécus pendant cette invasion par le feu :
. les autoroutes sont coupées, impossible de fuir en voiture
. de nombreuses coupures d’électricité ont lieu, les stocks de nourriture, d’essence & d’eau sont très vite à court
. les radios locales sont utilisées pour s’informer ; leur rôle est clé
. des exemples de collaborations sont narrés à la radio : l’exemple de locaux apportant de l’eau à des familles avec enfant coincés en véhicule (car fuyant une autre ville encore plus touchée), l’exemple d’employés de supermarchés aidant les clients à trouver de la nourriture en conserve ou sèche dans le noir avec des lampes frontales (car tout ce qui était dans les congélateurs est devenu inutilisable), etc.
. « tout a changé précisément à 13:57 quand le service d’urgence a envoyé le SMS suivant à la population » => « A ceux qui sont à Ulladulla, dans la Bay, le Basin et la zone Nowra — trouvez un abri, le feu arrive »
. une partie de la famille était en train de faire des courses pour le réveillon… qui sera avorté pour se transformer en plan d’urgence
. « il était difficile de réfléchir à froid, les coeurs s’emballent sous le stress, la panique est présente & croissante quand les premières cendres pleuvent et la lumière faiblit bien avant la nuit » (puis de nuit c’est l’inverse, une lumière orange du feu approchant)
. le témoignage de personnes se réfugiant dans un lac jouxtant leur habitation est cité
- voilà ce que la famille en question a fait :
. le plan décidé a été de veiller et de préparer une fuite en kayak si le feu venait trop près
. la baignoire a été remplie d’eau, les tuyaux de jet d’eau préparés
. le matériel préparé : couvertures en laine, serviettes, bouteilles d’eau, gilets de sauvetages, des piles achetées à une station service proche (pour les lampes & radio), des sacs Ziploc pour protéger le matériel électronique de l’eau
. « chacun s’est habillé du mieux qu’il pouvait pour la situation »
. des « shifts » sont organisés, certains se reposent ou préparent pendant qu’un tour de garde veille : écoute de ce qu’il se dit à la radio, surveillance du ciel et des alentours
. un petit enfant se met en stress à force d’entendre les messages d’urgence à la radio ; la famille l’éloigne de la radio ; un adulte joue avec lui
. si le feu s’approche, femmes, enfants & chiens iront avec les gilets de sauvetage sur la plage et les hommes porteront les kayaks
. à 1h du matin, un message d’alerte informe la population que le niveau d’alerte pour la zone concernée baisse d’un cran
. l’application « Live Traffic » informe de la ré-ouverture de l’autoroute pour Sydney => changement de plan, fuite immédiate pour la partie de la famille venant de Sydney
. sentiment de culpabilité d’abandonner les locaux pour fuir à Sydney (+ sécurisé)
Ce retex a des similarités avec celui de Rouen, et il ne montre aucun geste héroïque, mais beaucoup de stress, des décisions déjà difficiles à prendre à froid et encore plus difficiles à prendre dans la panique (dans leurs cas, une décision de fuite dans l’après-midi aurait pu être une erreur) : comment s’entraîner à cela ?
On retombe dans les problèmes structurels de la sécu perso, de la self & du survivalisme : comment entraîner des compétences qui ne seront peut être (hopefully) jamais utilisées, et si elles le sont, jamais dans un contexte similaire à celui de l’entrainement… difficile, mais la mauvaise conclusion serait de se dire qu’il ne sert à rien de se préparer.
Deuxième article synthèse/retex après celui sur l’explosion à Rouen, et c’est super intéressant. J’ose pas dire que j’espère qu’il y en aura d’autres, vu que ça implique une catastrophe quelque part, mais c’est très instructif.
Bsr,
savoir pour prévoir, prévoir pour pouvoir.